J'entends la voix de la nuit crier, cahoter
Je l'entends haleter
le train de nuit
Les voies parallèles
M'enfoncent dans la nuit
Soudain curieux
Combien de kilomètres la nuit a t-elle ?
Résolu à ne pas m'endormir
Je tente de la mesurer
Soudain
Mes paupières tombent
La nuit se fond dans mon sommeil
Au matin
Le soleil envahissant soulève brusquement mes paupières
Les voies parallèles restent infinies
Le train a traversé la nuit
Je me retourne
La nuit est restée derrière
Et je ne sais toujours pas
La nuit est longue, mais de... combien...
De kilomètres éperdus
1995
Ly Hoang Ly
Traduite par Phan Huy Duong
Sculpture
Je pince la guitare
De mes doigts caleux
On dit que jouer de la guitare rend le coeur malade
Je regarde la chambre éclairée par une lampe rouge
quatre mètres carrés
Trois femmes d'une vingtaine d'années
L'une git
Près d'un paquet de lettres de son amant - au bord des larmes
Son premier amour vient de se briser
douleur sans baume
l'autre sourit, plissant légèrement ses lèvres
Et regarde vaguement au plafond
une toile d'araignée
Vaguement, elle regrette
d'avoir un amant
un homme
collé à ses basques...
La troisième
Lève les yeux, contemple la pluie au-delà de la fenêtre
Boum bourn
La guitare
Accompagne
De son écho
Je pince la guitare, elle résonne, rythmée
Distraitement, regardant la pluie passer devant la porte
On dit que jouer de la guitare rend le coeur malade
Ceux qui ont le coeur malade
ont très peur
de devoir un jour aimer
Ne serait-ce qu'une seule fois aimer
et puis mourir
Je pince la guitare
Egrène le chant d'amour, Roméo-Juliette
Pour moi-même. Et pour qui ?
La lumière rouge tremble
Dans la nuit, sous un crachin interminable
Sur quatre mètres carrés
Avec trois jeunes femmes
1995
Ly Hoang Ly
traduite par Phan Huy Duong